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Karim Gharbi, la grande scène de l’étrange étranger

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Karim Gharbi (photos Christian Laffont-Roudier)

 

25 septembre 2015, Karim Gharbi et Dorian Dumont (piano), scène à domicile. Artigat (Ariège),

 

Pour vous dire la rencontre, empruntons à Prévert : Étrange étranger… homme d’un  pays loin… doux petit musicien…Tunisien, non pas de Grenelle mais de Bruxelles d’où il nous vient.

Mille kilomètres, du nord au sud pour venir à la rencontre d’un tout petit public, sous le toit d’une maison, pas même à Toulouse. Il en faut du courage et de l’abnégation ! Il en a fallu, bien avant ce rendez-vous, au père tunisien qui s’arracha un jour à sa terre… Aventure humaine au cœur décidément de ce qui bouscule l’âme et le cœur dans son premier album fraîchement sorti : Poisson d’or. Mais nous y reviendrons.

Vous l’aurez compris, nous n’échapperons pas aux questions inévitables sur la survie du chanteur. Jusqu’à quand, jusqu’où ? On finit toujours par conclure malgré tout : c’est un si grand privilège que de chanter.

Mais laissons-nous porter, transporter d’abord par le duo Karim Gharbi/Dorian Dumont, offert par nos hôtes de ce soir, généreux passeurs de rêves. Plus d’une heure durant nous sommes bousculés en tous sens par le chahut de Karim. Vous avez dit chahut ? Oui, chahut, danse (faussement) désordonnée, tumulte, vacarme, tapage. Il frappe fort, Karim Gharbi !

L’artiste et son pianiste

Et pourtant c’est dans la lenteur qu’il commence, avec Prévert justement, et nous en restons définitivement conquis. Déjà comblé nous aurions pu quitter la pièce après ce Pour toi mon amour, qu’il termine en sifflant doucement. L’atmosphère est installée. Il continue avec Les Marionnettes, cette errance de celle qui « carnavale sans le sou » dans la ville où s’animent les vitrines. On pense à la marche dans Bruxelles de Barbara un jour de grande faim et de misère… Mais pas le temps de s’y attarder, le voyage continue, porté par la déraison de l’artiste. L’ambiance est chaudement habitée par le piano, piano-bar, piano jazz, piano lyrique, c’est selon, mais partenaire à part entière qui se débride, se déchaîne tout autant que le chanteur.

 

Les textes de Karim Gharbi n’épargnent rien. « Il met sur la table ce que d’autres laissent sous le tapis » écrit avec justesse Charly Osbourne qui rend compte d’un concert à Carthage : la dénonciation de nos peurs (La notice), de la faillite de notre système (Le blues de l’œuf dur…Tiens, clin d’œil à Prévert encore !) par même la folie (Narcisse). Mais ils s’habillent d’« émaux et camées » aurait dit un autre poète, romantique celui-là. Comme le démontre le titre Poisson d’or, titre éponyme de l’album qui plonge dans la tragédie de l’exil. En scène, Karim ne s’attarde pas dans ce registre, d’une pirouette (au sens propre !) il nous entraîne très loin de la tentation de la douleur qui pourrait condamner à l’immobilisme. Il ose alors toutes les facéties, clowneries et pitreries. C’est dans un pastiche irrésistible qu’il nous emporte à la fin, détournant les Rita Mitsouko (C’est comme ça), Mikael Jackson (Like au virgin), Charlotte for ever qui devient Xanax for ever !

 

C’est avec le célèbre titre d’Hugues Aufray Céline qu’il revient en rappel et c’est pour nous ravir de sa superbe reprise légèrement arabisante. Retour à l’émotion.

Au printemps prochain, un an après la sortie de son premier album en Belgique, l’artiste baroque en diable, sera sur la scène mythique du théâtre 140 à Bruxelles, entouré de six musiciens. La tentation est grande de vivre ce moment là et de vous en rendre compte. Rendez-vous pris. Inch Allah !

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